Le Codéveloppement avec des Directeurs d’une multinationale du luxe

Le co-développement, adapté à un environnement international, a permis à des directeurs d’une maison de luxe de renforcer leur leadership, résoudre des problèmes réels et améliorer la collaboration transversale

Le contexte de ce Codev

 

Lorsque j’ai été sollicitée pour travailler en partenariat avec le responsable formation d’une maison internationale du luxe, l’enjeu était clair : continuer à développer les compétences de directeurs qui avaient déjà bénéficié de toutes les formations possibles et imaginables.

Ces participants triés sur le volet étaient en charge de marques de mode, de parfum et de cosmétiques différentes, travaillaient dans des pays différents en Europe et aux Etats-Unis, et avaient des expertises différentes (Finances, Supply chain, RH, Marketing, Retail, etc.).

Dans tous les secteurs à forte culture de marque, l’exigence d’exemplarité, la gestion de l’image de marque et la quête d’excellence sont omniprésentes et imposent un management relationnel fort et créatif. La diversité culturelle, l’éloignement géographique et la nécessité de préserver l’unicité des valeurs de la maison-mère ajoutent une complexité supplémentaire au management des équipes et à la prise de décision.

Le commanditaire souhaitait donc une démarche à la hauteur de ce niveau d’exigence, capable de combiner profondeur d’analyse, impact concret sur leur pratiques professionnelles et respect de la culture d’entreprise, tout en s’adaptant aux contraintes géographiques et aux enjeux communs post-Covid.

Les enjeux de ce codéveloppement

Compte-tenu de la complexité de leur structure mondiale et de la dynamique propre à chaque équipe, l’objectif n’était pas de former les directeurs et directrices à de nouvelles techniques. Il s’agissait de les aider :

  • à développer de nouvelles compétences de type « softskills », notamment de renforcer le leadership transversal dans la conduite du changement.
  • à jouer un rôle d’appui mutuel dans un secteur d’activité soumis à de fortes tensions commerciales, notamment de sortir d’un sentiment d’isolement accentué par la distance et la pression de la représentation. « Je me sens souvent seule face à des décisions difficiles, je ne sais pas toujours auprès de qui partager mes doutes », a confié l’une des participantes avant de se lancer.

Ils n’avaient que rarement l’occasion d’échanger entre pairs sur leurs pratiques. Et encore moins dans un cadre sécurisé, sans enjeu politique. Le programme de co-développement devait leur offrir cet espace d’apprentissage entre pairs, de manière très différente d’un coaching collectif.

L’approche proposée pour ce codéveloppement

Dans ce contexte, un processus structuré qui permette aux participants de tirer parti de leurs expériences et de leurs perspectives respectives semblait le plus adapté. Le dispositif s’est étalé sur quatre mois, avec six participants volontaires issus de plusieurs pays, en visioconférence. Les temps forts :

  • Session 0 – Briefing : cadrage, clarification des règles du co-développement, définition des attentes de chacun.
  • Sessions 1 à 4 – Codev : chaque session de 2h voyait un participant jouer le rôle de « client » et partager un sujet réel et stratégique. Les autres jouaient le rôle de « consultants », en donnant des conseils, un retour d’expérience ou des exemples de propositions d’actions. Parmi les exemples de cas traités : nécessité de réduire les budgets en maintenant les échéances, difficulté à coordonner des filiales dans plusieurs pays, problèmes de coordination internationale dans les processus d’achat communs, difficultés à atteindre les objectifs internes d’inclusion au sein d’équipes multiculturelles, forte pression liée à l’internationalisation d’un service support, etc. Tous se sont rendus comptes à quel point ils partageaient des enjeux communs de management et de leadership, malgré leurs marques et régions différentes.
  • Session 5 – Débriefing : bilan collectif, prise de recul sur les apprentissages en tant que client et consultant, évaluation du dispositif.

La méthode, inspirée de Payette et Champagne, repose sur l’intelligence collective : chaque client expose à tour de rôle une problématique réelle, le reste du groupe questionne, fait des propositions de pistes, puis chacun s’engage sur des actions concrètes. J’ai veillé à ce que chacun se sente à la fois acteur et bénéficiaire du processus. À distance, la sécurisation du cadre était essentielle pour créer un climat de confiance : confidentialité, écoute active, temps de parole équitable, et utilisation d’outils digitaux adaptés, notamment pour la reformulation écrite des problématiques pour ancrer les échanges. Dans les faits, malgré les agendas surchargés et le flot quotidien d’aléas, il était rare qu’un participant soit absent pour une session.

Le cheminement des participants à ce codev

Ce type de programme centré sur la pratique professionnelle n’est pas simplement un “temps d’échange” : c’est un outil stratégique de développement managérial et de leadership. Il agit autant sur les postures que sur les pratiques, en alignement avec les standards d’excellence de marques à haute valeur ajoutée.

Dès la deuxième session avec la première cohorte de participants, j’ai observé une évolution dans les interactions. Ils ont commencé à sortir de la posture purement analytique pour entrer dans une écoute véritable.

  • Capacité à formuler une demande concise : les participants ont (ré)appris à exposer leurs questions et leurs doutes et à solliciter leurs pairs de manière structurée et concise.
  • Écoute active et non défensive : en posture de « consultants », les participants ont progressé dans l’art de poser des questions puissantes, sans jugement. Un participant a d’ailleurs confié au groupe lors de la séance de bilan : « Ce programme m’a permis d’avoir des alliés là où je voyais des concurrents. »
  • Capacité à résoudre des problèmes : les sessions ont également permis d’améliorer leur capacité à aborder les problèmes sous plusieurs angles et penser de manière plus créative, en tant que forces de proposition. Les participants ont tous été surpris par le côté « immédiatement applicable » des solutions et des actions proposées par leurs pairs.

Aujourd’hui, je sais qu’à chaque nouvelle cohorte de participants, plusieurs d’entre eux continuent à se solliciter en dehors des sessions, preuve qu’un réseau de confiance s’est créé. Et pour l’entreprise, cela signifie un meilleur maillage transversal et une meilleure capacité à soutenir la transformation, à mesure que les cohortes se succèdent et que les participants recommandent cette approche en interne.

Les facteurs clés de succès de ce codev

Le succès de ce programme repose sur plusieurs choix méthodologiques. D’abord, ma posture de coach : garante du cadre, facilitatrice, mais jamais prescriptrice. J’ai instauré dès le départ un climat de confiance avec les directeurs, en rappelant les règles de confidentialité et en encourageant la neutralité bienveillante. Le format distanciel, choisi pour tous, a mis tous les participants sur un pied d’égalité, évitant la création de sous-groupes ou l’isolement de certains. Le co-développement s’est révélé particulièrement adapté à cet environnement international exigeant, parce qu’il valorise la co-construction de bonnes pratiques professionnelles et le respect des identités culturelles. Enfin, le débriefing collectif a permis de mesurer l’impact, de partager les réussites, et d’ancrer les apprentissages liés à leurs enjeux communs.

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